18 oct. 2009

Circularité de la pensée


Ma petite fille de 9 mois prend des objets, les regarde, les touche, les met dans sa bouche. Elle explore et apprend, élargi sa connaissance du monde.

Plus tard, pendant les études, les jeunes gens curieux absorbent les connaissances qu'on leur enseigne, débattent, observent, échangent, réfléchissent.

Puis les adultes les plus curieux continuent à apprendre, observer, enrichir leur connaissance du monde.

A chaque étape, le nombre de ceux qui continuent à apprendre diminue. Les autres se contentent de l'acquis. Pour lire le monde, ils se servent des catégories déjà existantes en eux.

C'est la circularité de la pensée.

5 commentaires:

  1. Je ne sais pas comment dessiner un schèma dans un commentaire, mais il me semble que la structure que tu décris n'est pas un cercle, mais plutôt un arbre d'un genre bizarre : au départ, tout le monde -ta fille et les autres enfants- monte tout droit, puis le tronc se scinde en deux branches, celle de ceux qui continuent à monter -les étudiants- et les autres qui entrent dans un premier cercle ; puis on a dans la branche des étudiants une nouvelle scission, entre ceux qui deviendront les adultes les plus curieux, et les autres,qui entrent dans un second cercle, chacun de ces cercles se situant plus haut que les préceédents -à moins qu'il ne s'agisse d'un seul et vaste cercle, la grande ronde de la connaissance qui emploie pour connaître des catégories déja établies.

    Je vois deux questions : ne peut-on pas monter toujours tout droit, ou notre sort à tous est-il de finir par entrer, plus ou moins vite, dans la ronde ?

    Et la connaissance n'est-elle pas plutôt la sève qui fait pousser l'arbre, l'élan qui nous pousse depuis l'enfance ?

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  2. Merci Ben pour ton commentaire, qui me fait comprendre que je me suis exprimé comme un pied.

    Pour moi, la circularité de la pensée ne désignait pas le cercle des curieux, mais la paresse de ceux qui se contentent de ce qu'ils ont déjà appris.

    Une pensée circulaire, c'est une pensée qui ne s'ouvre plus au réel, qui n'est plus fécondée par la nouveauté. C'est un système tautologique, où l'on voit dans le monde ce qu'on a dans la tête. Ou l'on ressasse les mêmes certitudes.

    La circularité de la pensée s'oppose à la précarité de la pensée, qui n'est jamais sûre de ce qu'elle croit savoir.

    Les pensées circulaires, ce sont les notables de province. Les pensées précaires, ce sont les chercheurs, les curieux professionnels.

    Tu sais ce qu'on dit de Dieu : on ne peut rien dire de positif sur lui, on peut juste dire des choses négatives. Dieu n'est pas fini. Dieu n'est pas con. Dieu n'est pas de droite. Dieu n'est pas haineux. Bien sûr, on peut dire Dieu est infini, mais c'est une négation de négation, ou Dieu est amour, mais c'est le mot amour qui devient une chose à définir par la négative : l'amour n'est pas le soucis de soi, l'amour n'est pas la fermeture. Les grandes choses, en général, échappe à la définition, et c'est pourquoi il est plus aisé d'en parler par la négative.

    La circularité de la pensée, c'est une affirmation, un dogme, une raideur, une fermeture. La précarité de la pensée, en revanche, dit en substance "je ne sais pas ce qu'est cette grande chose, mais je sais qu'elle n'est pas cela et cela". C'est une ouverture sur le grand, et donc sur le mystère, et donc sur l'indéfinissable. D'où sa condamnation à l'ouverture.

    Ici, la connaissance est le déjà connu, le sec, et l'igorance, ce qu'il reste à connaître, le frais et l'ouvert.

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  3. Je viens de comprendre que j'ai mal compris ton commentaire, et que tu as en revanche très bien compris mon billet, mea culpa.

    Sur ta deuxième question, moi je vois plutôt les choses dans le sens inverse, comme je l'ai dit dans ma première réponse : la connaissance, le déjà connu, est un peu ennuyeux, ce n'est pas trop une force de mouvement. Il me semble que l'ignorance, le questionnement, l'étonnement, est beaucoup plus dynamique, que c'est l'ignorance notre force de mouvement.

    Quant à la première question, on espère qu'on ne finira pas vieux cons plein de certitudes trop vite. A suivre.

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  4. Je découvre un Martin Angel théologien, spécialiste de la théologie négative. Aime-t-il Maître Eckhart ?

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  5. Bien vu Nénette. L'idée qu'on ne peut définir Dieu que par la négative vient effectivement de lui (pour être franc, j'avais oublié d'où cette idée me venait, ayant lu Maître Eckhart il y a assez longtemps).

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